D’une thèse à l’autre

Dans la grande majorité des cas, le choix des objets qui focalisent l’attention du chercheur est dicté moins par des préférences spontanées, une appétence aiguisée par une expérience singulière que par des circonstances, que celles-ci prennent la forme d’un événement, d’un contact privilégié avec des collègues, d’un financement, d’une injonction institutionnelle, voire plus souvent et bien plus prosaïquement de l’action désorganisée d’un ensemble d’éléments de ces natures qui rend à ses yeux évidente la nécessité de réorganiser la hiérarchie de ses priorités scientifiques. Quand il a une idée précise de son cap – si ce n’est pas le cas pour tous, c’était indubitablement celui de Nacuzon –, le chercheur est à l’affût des vents porteurs et des courants favorables qui peuvent le faire progresser dans la direction qu’il s’est choisie. Pour changer de métaphore, il est comme le « bon joueur » décrit par Bourdieu, toujours placé là où arrive la balle qui lui permet de marquer.

Pour des bonnes raisons de ce genre, les intérêts scientifiques de Nacuzon furent divers. Un seul d’entre eux sera commenté dans cette contribution, c’est celui qu’il a porté à l’enseignement supérieur africain. Les traces de cet intérêt se marquent dès ses premiers pas dans la carrière scientifique. La thèse de troisième cycle qu’il soutient en 1981 à Paris Descartes porte sur La crise de l’enseignement supérieur au Sénégal. Ce titre est assorti d’un très long sous-titre dont seuls les derniers mots sont à retenir ici, parce qu’ils indiquent les axes d’un projet intellectuel dont il ne déviera pas et qu’il reformulera ensuite de manière positive en abandonnant la posture dénonciatrice : rapport de l’exploitation économique et de la domination culturelle. Quinze ans plus tard, en 1996, il a soutenu un doctorat d’État en lettres et sciences humaines à l’UCAD avec une thèse intitulée : Efficacité et équité de l’enseignement supérieur. Quels étudiants réussissent à l’Université de Dakar ?

 Entre ces deux intitulés, on peut constater à la fois la constance de l’intérêt qu’il a porté à l’enseignement supérieur et un déplacement de sa perspective théorique.  

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